dimanche 20 décembre 2009

La mariée de papier

A l'occasion de leur 40ème anniversaire de mariage, Edgar et Gerda m'ont commandé une création personnelle, sur le thème des épousailles, des très longues épousailles. Gerda et Edgar ont vécu ensemble si longtemps que jamais je n'arriverai à fêter cette étape, même si j'avais l'audace de convoler demain. L'histoire m'ayant confirmé, hélas, à plusieurs reprises mon incompétence sur le thème, je me sentais, à priori, dans un état d'esprit confus, brouillon, maladroite dans ce projet. Incertaine du résultat, j'étais pourtant prête à vivre l'expérience.

J'ai trouvé un morceau de planche, fragment d'une étagère déclassée qui pouvait être mon premier élément de base et semblait approprié pour servir de support à mes divagations. Je me suis installée par terre, comme j'aime l'être : au sol. J'ai étalé autour de moi des matériaux divers qui pouvaient m'être utiles dans la tâche, des composants qui me sont familiers : des papiers, des catalogues, des tissus, rubans, de l'acrylique, de la colle, des pastels, des bouchons, des morceaux de miroirs, quelques pinceaux... La mémoire ne me fait pas défaut lorsque l'émotion domine, voici donc ce dont je me souviens..

J'ai ébauché un tableau de matières collées

Sur le thème imposé du mariage :

La fiancée, au crayon à peine esquissée ,

Disparu sous les lambeaux déchirés des pages.

Affublée d'une robe de dentelle ancienne

parsemée de bris de miroirs aux alouettes

De larmes de peine, de fragments de porcelaine

De grains de poivre noir, de poudre d’escampette,

Ses diverses strates furent fixées au vernis-colle.

Pour juger l'ouvrage, je me suis levée du sol.

La composition était lourde. L'effet grossier

peinait à confirmer au thème son intérêt :

Epousée pour la vie, la princesse éphémère

était affublée d'une pesanteur outrancière,

J'éprouvais une folle envie de tout arracher

Ce que je fis. Sous les épaisseurs des matières,

La fine esquisse au crayon graphite émergeait

Dans les égratignures du carton agressé.

Je tenais sous la pulpe de mes doigts caressants,

La dernière mariée, celle qui m’avait échappée.

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